Le 29 décembre dernier, l’Afrique du Sud a saisi la Cour Internationale de Justice (CIJ) suite au dépôt d’une plainte de 84 pages documentées accusant Israël d’avoir violé la Convention des Nations unies sur le génocide de 1948. Basée à La Haye aux Pays-Bas, la plus haute juridiction des Nations Unies a rendu un premier verdict ce vendredi 26 janvier se déclarant compétente pour statuer sur cette affaire accusant le gouvernement israélien de commettre un génocide à Gaza. La décision provisoire rendue a ordonné plusieurs mesures conservatoires : prendre toutes les mesures visant à prévenir les actes génocidaires, prévenir et réprimer l’incitation directe et publique au génocide, et prendre des mesures immédiates et efficaces pour assurer la fourniture d’une aide humanitaire aux civils à Gaza. « L’ordonnance de la CIJ indique clairement que l’Afrique du Sud a présenté un cas si plausible qu’elle doit ordonner des mesures provisoires immédiates pour protéger les droits du peuple palestinien contre un génocide potentiel en cours » a déclaré la présidente de la Guilde nationale des avocats, Suzanne Adely.

 

C’est également un camouflet pour les soutiens occidentaux d’Israël, notamment la France, qui ont balayé d’un revers de main les graves accusations portées par l’Afrique du Sud et de très nombreuses instances et organisations internationales. En particulier, le ministre français des Affaires Étrangères, Stéphane Séjourné a déclaré « qu’accuser l’État juif de génocide, c’est franchir un seuil moral » lors de questions au gouvernement à l’Assemblée Nationale le 17 janvier dernier. Pire encore, la France réagit à la décision de la CIJ en rappelant son engagement à un cessez-le-feu quand dans le même temps elle poursuit ses ventes d’armes à Israël.

 

Cette décision contre Israël devant une instance internationale est donc historique bien que limitée. En effet, les décisions de la CIJ sont juridiquement contraignantes mais l’instance est en réalité impuissante. Elle ne dispose pas de moyens pour les imposer au gouvernement fasciste de Netanayhu qui a jugé « scandaleuse » cette nouvelle. De même manière, la Cour n’a pas directement ordonné à Israël de cesser ses opérations militaires à Gaza, comme l’avait demandé le gouvernement sud-africain dans sa requête à la Cour. Cela a provoqué une vague d’indignation, notamment chez de nombreux·ses Palestinien·nes de Gaza, révolté·es et épuisé·es par près de 4 mois d’une agression génocidaire qui a déjà coûté la vie à plus de 26 000 civil·es palestinien·nes. Des responsables sud-africains, dont le ministre des Affaires étrangères Naledi Pandor, ont fait valoir que pour appliquer la décision de la Cour interdisant les actions génocidaires, Israël devait mettre fin à ses bombardements et à son invasion de Gaza.

 

Par ailleurs, la Guilde Nationale des Avocats souligne dans un communiqué : « Nous sommes également préoccupés par le fait que la Cour n’a pas noté dans son ordonnance le droit du peuple palestinien à résister, fermement reconnu par le droit international, ni que la revendication israélienne d’un « droit de légitime défense » contre un peuple soumis à l’occupation et au colonialisme est sans fondement. Ces omissions affaiblissent la mission déclarée de la Cour de faire respecter le droit international et de promouvoir la justice internationale, apparemment dans le but d’apaiser les parties qui, selon elle, ont besoin de mesures provisoires pour réduire le risque de génocide. Nous considérons que cela reflète fondamentalement l’insuffisance des organes et institutions juridiques internationaux pour faire face aux crimes des puissances impérialistes et de leurs alliés. »

 

Cette décision ne signifie évidemment pas qu’un cessez-le-feu adviendra dans les jours à venir, ni que le génocide prendra fin rapidement, ce qui démontre une fois de plus les limites du droit international. Celui-ci n’est que le reflet du rapport de force existant sur la scène internationale à un moment donné. Néanmoins, la décision de la CIJ contribue à isoler Israël sur la scène internationale et doit être comprise comme un appel à développer notre engagement pour imposer la fin du génocide à Gaza, mais également dénoncer la complicité de l’impérialisme occidental dans ces crimes. Enfin, aucune décision de « justice » n’a jamais libéré un peuple du colonialisme. Seule la résistance du peuple palestinien au côté d’un mouvement international anti-impérialiste et antisioniste croissant permettra de mettre fin à plus de 75 ans de colonisation de peuplement et permettre la libération de la Palestine de la mer au Jourdain.