Un article d’information publié le 4 janvier dans le quotidien israélien Haaretz fournit de plus amples preuves que les Etats-Unis et Israël utilisent l’aide humanitaire comme une feuille de vigne pour masquer le génocide à Gaza.

Israël retarde délibérément l’ouverture du check-point d’Erez, dans le nord, lequel est utilisé pour contrôler les allées et venues des personnes entre Gaza et Israël, et ce, « sous pression des États-Unis ». Washington « conditionne la poursuite de son soutien des combats en fonction de l’accroissement de l’aide » au territoire, dit le journal.

L’administration Biden prétend soutenir un plus grand afflux d’aide à Gaza et s’est vantée de la réouverture le mois dernier du passage commercial de Kerem Shalom, à proximité de la frontière égyptienne.

Mais l’organisation de défense des droits humains, qui surveille les restrictions de mouvement par Israël, a déclaré mercredi que, « suite à des semaines de siège et de bombardements incessants », l’aide qui entre par Kerem Shalom se situe « à des années-lumière de ce qu’il faudrait ».

Les organisations d’aide prétendent qu’un cessez-le-feu, auquel s’opposent Israël et les Etats-Unis, est nécessaire pour augmenter la livraison de toute cette aide vitale. Pendant ce temps, les organisations des droits humains et les ONG humanitaires affirment qu’Israël se sert de la famine comme d’une arme de guerre, à Gaza.

Les organisations palestiniennes ont cautionné les propos du secrétaire général de l’ONU qui dit que les agences d’aide de l’institution mondiale à Gaza « aidaient les objectifs de guerre d’Israël, en infraction à l’égard des lois internationales », quand elles respectaient les « restrictions illégales » imposées par Israël.


L’aide n’arrive pas au nord de Gaza

 

Seule une très infime partie de l’aide apportée via le sud de Gaza atteint en fait les centaines de milliers de Palestiniens restant dans le nord. La majeure partie des 2,3 millions de Palestiniens ont été déplacés à plusieurs reprises et se retrouvent de plus en plus concentrés à Rafah, près de la frontière égyptienne.

Haaretz en a imputé la faute au fait que l’aide qui entre via le sud est interceptée aussitôt qu’elle apparaît.

Gisha a déclaré que des foules désespérées essaimaient autour des camions d’aide suite aux besoins aigus qu’elles ressentaient.

« Certaines bandes tentent de profiter de la situation en s’emparant des denrées de base et en les revendant à des prix exorbitants », a ajouté l’organisation de défense des droits.

« C’est un phénomène courant dans des zones de conflit et de pénurie et il convient de le mitiger en partie en augmentant la quantité de marchandises disponibles pour la population locale. »

Martin Griffiths, le responsable de l’ONU pour les droits humains, a désigné un très grand nombre de facteurs qui empêchent la livraison de l’aide à Gaza, et nombre d’entre eux découlent de la politique israélienne (même s’il a évité de citer nommément Israël) : des inspections redondantes, « une liste croissante d’articles rejetés », les bombardements constants et le fait qu’on tire sur les convois.

Une source du gouvernement israélien a expliqué à Haaretz que « Israël fournissait aux Etats-Unis un rapport journalier sur la situation humanitaire » – une preuve de plus de la complicité de l’administration Biden dans la campagne génocidaire d’Israël à Gaza.

Le territoire est sous un blocage israélien à intensité variable depuis plus d’un demi-siècle, en tout cas, au moins depuis son occupation militaire par Israël à partir de 1967.

Israël a déclaré un siège total – une forme de punition collective – à Gaza le 9 octobre, c’est-à-dire deux jours après l’opération militaire du Hamas.

À ce moment-là, les chefs politiques et militaires israéliens ont exprimé clairement leur intention de faire de la vie à Gaza un véritable enfer.

C’est le seul but de guerre qu’Israël est parvenu à concrétiser, en l’absence d’une défaite militaire du Hamas. Et cela sert le but ultime d’Israël de rendre Gaza invivable et de forcer une expulsion massive des Palestiniens hors du territoire.

 

Le contrôle israélien

 

Israël exerce un contrôle total sur tout ce qui entre à Gaza et qui, depuis fin octobre, se limite à « des aliments secs de base, des médicaments et des fournitures médicales, des tentes et divers équipements servant à installer des enceintes humanitaires dans le sud de Gaza », selon Haaretz.

Le nombre de camions d’aide entrant par jour à Gaza constitue une infime fraction de ce qui entrait dans le territoire sur base quotidienne avant la guerre. Les restrictions israéliennes à l’importation et la suspension des activités commerciales à Gaza constituent des facteurs primaires dans les « niveaux catastrophiques de la sécurité alimentaire aiguë » dans le territoire, selon une étude réalisée par des agences internationales qui tiennent la famine à l’œil.

Un expert de la santé publique mondiale dit que, si rien ne change, les centaines de milliers de Palestiniens qui n’auront pas été tués par les bombardements pourraient mourir « de causes de santé évitables et de l’effondrement du système médical » dans moins d’un an, suite à la politique israélienne.

Haaretz affirme qu’Israël a récemment autorisé l’entrée de fruits et de légumes dans les livraisons d’aide à Gaza, « et il a l’intention d’y ajouter également des produits laitiers et des produits carnés ».

Les lois humanitaires internationales s’avèrent une autre victime de la guerre génocidaire américano-israélienne contre Gaza. Néanmoins, « Israël a des obligations envers la population civile de Gaza (…) qu’elle a continué de renier de façon flagrante », a déclaré Gisha.

« En tant que puissance occupante, il a l’obligation de fournir » de l’aide humanitaire, a ajouté l’organisation de défense des droits. « Bloquer délibérément des envois humanitaires pouvant sauver des vies est un crime de guerre, au même titre que les punitions collectives. »

Même Karim Khan, le très partial procureur en chef de la Cour pénale internationale (CPI), a déclaré que « l’assistance humanitaire devait pouvoir entrer régulièrement et à grande échelle à Gaza ».

Et d’ajouter que, si « Israël ne s’y conformait pas maintenant, il ne faudrait pas qu’il se plaigne plus tard ».

Il est également très question de la famine provoquée par le siège et le blocus israéliens à Gaza dans la plainte de l’Afrique du Sud qui a engagé une procédure devant la Cour internationale de justice des Nations unies.

 

Article de Maureen Clare Murphy, rédactrice en chef de The Electronic Intifada, initialement publié le 5 janvier 2024

 

Source : The Electronic Intifada – Traduction : Plateforme Charleroi Palestine
Crédit photo de couverture : Mohammed Zaanoun / ActiveStills