Célèbre caricaturiste et dessinateur palestinien, Naji Al-Ali a produit plus de 40 000 dessins dont la plupart étaient consacrés à la situation imposée aux Palestiniens et à leur lutte pour la libération et le retour. À de multiples reprises, il a clairement exprimé sa ligne politique, affirmant par exemple : « La Palestine n’est pas loin. Elle n’est pas non plus proche. Elle est à la portée de la révolution. » En particulier, il a souvent dessiné son opposition à la politique de normalisation et de capitulation ainsi que son soutien à la résistance palestinienne et ses prisonniers, dont Georges Abdallah lors de son procès en 1986. Il est l’auteur du mythique personnage d’Handala, petit garçon qui deviendra un symbole mondialement connu de la lutte pour le retour de tous les réfugiés palestiniens. Le 22 juillet 1987, Naji al-Ali se fait tirer dessus à Londres. Après être resté dans le coma, il succombe de ses blessures le 29 août.
Grâce à l’important travail de Resistance News Network, nous avons le plaisir de reproduire ci-dessous plusieurs dessins (dont certains méconnus) de Naji Al-Ali qui rendent comptent de la radicalité de sa ligne politique. Ils sont accompagnés de quelques lignes de traduction et de mise en contexte politique. « Son héritage, tout comme son art, vit pour toujours. Naji, qui signifie survivant, n’est jamais mort. »
Personnages de Naji Al-Ali
- Fatima, une femme, est l’incarnation de la Palestine, du Liban et de tous les camps de réfugiés, souvent avec une clé autour du cou, symbolisant le retour.
- L’homme bon, alias Al-Zalama, représente les masses pauvres et en difficulté.
- Le méchant représente tout ce qui est négatif dans le monde arabe : la normalisation, le capitalisme et la cupidité.
- Handala, du nom d’un fruit amer, est la signature de Naji Al-Ali. Il ne vieillira qu’à la libération. Ses cheveux sont épineux comme une arme. Il porte des vêtements miteux. Il ne nous fait pas face, mais à la Palestine, et ses mains sont jointes au mépris des accords américains et sionistes.
Capitulation/Trahison
Le jeune Handala regarde l’homme bon écrire avec son propre sang : « Ne te réconcilie pas. Ne te réconcilie pas. Ne te réconcilie pas… »
Le signe « V de Victoire » de Yasser Arafat cache en réalité la soumission, la reddition et la capitulation.
Handala dit : « J’ai vraiment apprécié votre article d’aujourd’hui sur la démocratie. Qu’écrivez-vous pour demain ? » Réponse de l’homme bon : « J’écris mon testament ! »
Les pierres des enfants de l’Intifada épellent « Non » alors que l’ennemi sioniste présente une proposition pour un « gouvernement autonome ».
L’homme bon ouvre la porte du « régime autonome » et découvre un mur de briques étiqueté « colonies ».
Fatima détient la terre de la patrie, « Une poignée de terre, du pays des oranges tristes, apportez-la à ces imbéciles éperdument amoureux de l’Amérique. Peut-être que s’ils sentent cette terre, ils reviendront à la raison. »
Les agents palestiniens flagorneurs et les dirigeants de la bourgeoisie arabe qui revendiquent une loyauté éternelle envers « Oui, monsieur » Arafat se soumettent en fait à l’entité sioniste.
Normalisation
Un résistant porte le keffieh pour cacher son identité lorsqu’il combat. Un bourgeois arabe porte le keffieh sur son chapeau et sa cravate en guise de mode avant de faire des affaires avec l’Occident.
La bourgeoisie arabe trahit la résistance afin de faire la paix avec l’ennemi sioniste.
Les élites politiques et sociales arabes sont promptes à capitaliser sur les acquis de la résistance palestinienne et sont également en mesure de l’abandonner lorsque le moment est venu pour elles.
L’homme bon arrive au bureau de mobilisation générale pour la résistance. « Écoutez, Mr. Enregistrez-moi deux fois… La première fois, obligatoire, pour que je puisse combattre « Israël ». Et puis inscrivez-moi à nouveau au service volontaire, pour que je puisse combattre les régimes normalisateurs ! »
Les élites arabes chantent : « Le cadeau est arrivé ! Le savon américain, pour que nous puissions laver notre honte ! »
Résistance
Un résistant saignant, arme dégainée, annonce : « Nous ne nous inclinerons pas ».
Échec et mat. L’homme bon joue aux échecs contre le méchant, impuissant face à la résistance palestinienne.
L’homme bon écrit : « La Palestine est notre patrie ». Lorsqu’il a les bras liés, il crie : « La Palestine est notre patrie ». Il est muselé et pense : « La Palestine est notre patrie ». Il est martyrisé, et Handala et son ami écrivent avec le sang du martyr : « La Palestine est notre patrie ».
La Palestine est écrite avec un cœur et une balle. « Tout le sol de la patrie » est répété en arrière-plan.
Prisonniers
« Liberté pour les prisonniers politiques dans les prisons d’Israël et du monde arabe. » Une fleur courbe les barreaux de la cellule de prison.
Procès de Georges Abdallah en 1986 où les régimes arabes déclarent « Je n’ai rien à voir avec Georges Abdallah ».
Réfugiés
L’eau du sud du Liban nourrit les combattants de la liberté palestiniens ensanglantés.
« Nous ne hisserons pas les drapeaux blancs ! Nous ne hisserons rien d’autre que le drapeau palestinien pour protéger les camps [de réfugiés] ! »
Le méchant demande : « Êtes-vous musulman ou chrétien ? » L’homme bon répond : « J’ai faim ».
L’homme bon porte une chemise sur lauelle on peut lire : « Pas de paix. Pas de négociations. Pas de reconnaissance. Réfugiés de 1948 » alors qu’il est entouré des noms des camps de réfugiés palestiniens.